L’Armagnac aux accents hollandais
Comment une eau-de-vie produite dans les terres reculées d’une superbe région enclavée dans le sud-ouest de la France parvient-elle à répandre son aura aux quatre coins du monde ? Répondre à cette question, c’est répondre, d’une certaine manière, à tout un pan de l’histoire de l’Armagnac.
Au XVIIème siècle, les Hollandais règnent en maître sur les mers européennes qu’ils sillonnent à bord de leur puissante flotte maritime. Voguant au rythme de la houle, ils ont la main mise sur le commerce maritime, tout particulièrement celui qui concerne la vente de vins et de spiritueux.
A cette époque, la région de Bordeaux fait déjà figure de référence en matière de vins, tant et si bien, que les Anglais s’en réservent le monopole, contraignant les Hollandais à aller chercher leurs vins plus loin dans les terres, notamment dans le Gers, formidable terre d’accueil de l’Armagnac.
Seulement au port de Bordeaux, ces vins des terres sont interceptés par les autorités du port qui refusent d’encourager la commercialisation de vins autres que ceux de leur région.
Les Hollandais trouvent alors la parade. S’il est interdit de transporter des vins ne provenant pas de Bordeaux, rien n’interdit de transporter des alcools ne provenant pas de Bordeaux. Ainsi, encouragent-ils les armagnaçais à poursuivre leurs efforts dans l’élaboration d’eau-de-vie.
Les vaisseaux hollandais reprennent leur voyage, toutes voiles dehors, avec dans leur soute des cargaisons entières de brandewyh (vin brûlé), comme ils nomment déjà l’eau-de-vie armagnaçaise – mot qui, dans la bouche des Anglais, deviendra brandy.
Pour parfaire cette jolie pirouette qui a permis aux Hollandais de s’approvisionner en dehors de Bordeaux, on s’aperçoit rapidement que l’eau-de-vie gersoise se bonifie pendant le voyage au contact de son contenant : le fût de chêne.
C’est ainsi que l’Armagnac commence à s’infiltrer dans un grand nombre de pays européens. Les gersois, quant à eux, devront toujours une fière chandelle aux Hollandais, pour avoir permis cet essor fulgurant, et aux Bordelais, pour avoir, sans le vouloir, encouragé la production de leur eau-de-vie.
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